Où l’on entre dans l’Édifice, l’on découvre un visiteur mystérieux, l’on trouve un message secret avec des signes de nécromant, et disparaît, à peine trouvé, un livre qui sera ensuite recherché pendant bien d’autres chapitres, et, vicissitude qui n’est pas la dernière, où l’on vole les précieux verres de Guillaume.

Je vous propose un petit détour lettré pour l’explication :

FESTIN DE BALTHAZAR — MANÉ, THÉCEL, PHARÈS
MORT DE BALTHAZAR
(526 ans avant J.-C.)

Nabuchodonosor étant mort un an après qu’il fut remonté sur le trône, son fils, Balthazar, régna après lui. Il détestait tellement le travail, qu’il abandonna à sa mère Nitocris le gouvernement de son royaume pour ne songer qu’au plaisir. Un jour qu’il donnait un grand festin à mille de ses courtisans, il ordonna qu’on lui apportât les vases d’or et d’argent que son père le roi Nabuchodonosor avait rapportés du temple de Jérusalem. Quand ils furent apportés, le roi, qui était à moitié ivre, voulut boire dedans, et qu’ils servissent aussi à ses femmes et aux principaux de sa cour, pour boire en l’honneur de leurs faux dieux.

Pendant qu’ils profanaient ainsi les vases sacrés, on vit une main qui écrivait sur la muraille en face du roi. Et le roi voyait très-bien la main et les mouvements des doigts qui écrivaient.

Alors le visage du roi fut tout bouleversé ; ses jambes tremblèrent, ses genoux s’entre-choquèrent, et ses reins s’affaissèrent malgré lui. Le roi poussa un grand cri, et fit venir immédiatement ses devins, ses mages, et ses augures pour lui expliquer ce que c’était que ces mots d’écriture inconnue que traçait la main. Aucun ne put lire l’écriture ni l’expliquer. Balthazar fut encore plus effrayé et troublé.

La reine, touchée du trouble de son fils, s’approcha de lui ; elle lui conseilla de faire venir Daniel sur l’heure.

Quand il arriva, le roi lui dit : « Es-tu, Daniel, un des captifs de Judée, que mon père avait coutume de consulter dans toutes ses difficultés ? — Oui, Seigneur, répondit Daniel. — On m’a dit que tu as l’esprit de Dieu, et qu’on trouve en toi plus d’esprit, d’intelligence et de sagesse qu’en aucun autre, Si tu peux me lire cette écriture sur le mur, et me dire ce que cela signifie, je te ferai vêtir de pourpre, tu porteras un collier d’or, et tu seras le troisième d’entre les princes de mon royaume.

— Gardez vos présents, ô Roi, lui répondit Daniel, et donnez à un autre les honneurs de votre maison. Je vais vous lire cette écriture, et vous dire ce qu’elle signifie.

« Le Dieu très-haut avait donné à votre père la royauté, la grandeur, la gloire et l’honneur. Chacun tremblait devant lui ; il faisait mourir qui il voulait ; il détruisait ce qui lui déplaisait ; il élevait et abaissait les hommes selon sa volonté. Mais, quand son cœur se fut enflé d’orgueil, que son esprit s’éleva au-dessus de Dieu même, il fut chassé du trône, il perdit son royaume, sa gloire lui fut ôtée. Il fut séparé de la société des hommes ; il fut changé en bête, il demeura dans les bois avec les ânes sauvages, il mangea de l’herbe comme un bœuf, jusqu’à ce qu’il reconnut que le Très-Haut a le pouvoir sur les royaumes des hommes, et qu’il établit sur les trônes qui il lui plaît.

« Et vous, Balthazar, qui êtes son fils, vous saviez toutes ces choses, et vous n’avez pas humilié votre cœur. Vous vous êtes élevé contre le Tout-Puissant, vous avez fait apporter devant vous les vases de la maison sainte, vous les avez profanés en buvant dedans, vous, vos femmes et vos amis. Vous avez adoré, en même temps, les dieux d’or et d’argent, d’airain et de fer, de bois et de pierre, qui ne voient point, qui n’entendent pas. Et vous n’avez pas rendu gloire à Dieu, qui tient dans sa main votre âme et votre vie.

« C’est pourquoi Dieu a envoyé les doigts de cette main qui a écrit sur la muraille ce que vous voyez, et ce qu’aucun de vous n’a pu lire.

« Or, voici ce qui est écrit :

« Mané, Thécel, Pharès.

« En voici l’explication :

« Mané. Dieu a compté les jours de votre règne, et il en a marqué la fin.

« Thécel. Vous avez été pesé dans la balance, et vous avez été trouvé trop léger.

« Pharès. Votre royaume a été donné aux Mèdes et aux Perses. »

Alors Balthazar, espérant apaiser la colère de Dieu, en rendant des honneurs à son prophète, fit mettre au cou de Daniel un collier d’or, le fit revêtir de pourpre, et fit publier qu’il serait la troisième personne en puissance et en richesse dans tout le royaume.

Cette même nuit, Balthazar, roi des Chaldéens, fut tué par Cyrus, roi des Perses, qui entra dans la ville de Babylone qu’il assiégeait avec Darius, son oncle, roi des Mèdes ; ils se partagèrent le royaume de Nabuchodonosor.

Comtesse de Ségur, La Bible d’une grand’mère, L. Hachette et Cie, 1869 (p. 520-522).


Latin, « le secret de la pointe de l’Afrique ».


Latin, « C’est du grec, cela ne se lit pas ». Ce dicton est parfois attribué à Accurse, un jurisconsulte de Florence du début du XIIe siècle. On sait toutefois grâce à ses œuvres qu’il maîtrisait le grec.

Formule marginale courante que l’on retrouve dans les manuscrits. Elle fut surtout employée dans l’occident latin pour signifier l’ignorance du grec ancien, même par les savants et les doctes. La langue grecque a en effet souffert d’une amnésie quasi totale en Europe médiévale. Le verbe legere a ici un sens particulier (« lire publiquement », « expliquer », « commenter »).